Ça passe ou ça casse

Osez l’avouer, les autoroutes pépères, trop bien balisées, du cinéma d’auteur hexagonal ou international, vous laissent bien souvent somnolent, vous incitant à emprunter vite fait bien fait, des itinéraires de dégagement qui sentent bon la gomme brûlée, et résonnent du cri tordant-distordu de la tôle froissée. Ce qui vous allume le regard, c’est le mouvement qui déplace les lignes de votre écran bleu, c’est le chant disharmonieux et brutal du pare-brise éclaté au long du macadam interminable et fondu des autoroutes américaines. Pas de problèmes : la sélection de K7 que nous vous proposons ci-dessous, à défaut de vous refiler une migraine d’art et d’essai, vous flanquera une joyeuse pétoche, le plus souvent de série B, mais toujours en quatrième vitesse. Nous prenons le départ au volant de «Flush», une production caractérielle inédite que vient de lancer Victory Vidéo. Ce tout jeune label promet puisqu’il nous offre sans ambages «la poursuite la plus bordélique de l’histoire du cinéma». On n’invente rien, c’est inscrit sur la jaquette ! Alors «Flush», réalisé par un certain Andrew J. Kuehn, interprété par un plein hangar de pare-chocs tirebouchonnés, c’est l’histoire pas guindée de William Randolph Hughes, un milliardaire excentrique (être milliardaire étant une excentricité en soi). Le nabab a enterré, avant de mourir, six mystérieux coffrets qu’il a disséminés sur le territoire US. Vingt ans plus tard, une fosse septique explose dans une station service. De l’odorant capharnaüm — restons poli — on extirpe l’un des coffrets qui recèle une bouteille de gin, une pièce d’or, et un manuscrit du facétieux Richard qui invite l’inventeur de ces bricoles à une faramineuse course au trésor. La nouvelle se répand comme une traînée de poudre, et tous les Philippe de Dieuleveul de par là-bas taillent la route et sèment les coups bas. Ne retirez pas votre ceinture, un «Flush 2», réalisé par un autre Fangio des caméras sera disponible dès octobre chez le même éditeur. On ne peut parler de stockcar celluloïdique sans évoquer le cas extrême d’Hal Needham, instigateur de la populaire série des «Smokey». Needham, ancien cascadeur et réalisateur de seconde équipe sur de nombreux films d’action, fut longtemps la doublure de Burt Reynolds. Il se rangea un jour des voitures accidentées sans renoncer à les filmer sous toutes les coutures, avec d’autres acrobates que lui derrière le volant. Naturellement, il songea à Reynolds pour faire de lui la star de son cinéma à roulettes. Tous les «Smokey/shérif» sont bâtis sur le même modèle : argument scénaristique mince comme un fil, gags énormes, et numéros de trapèze roulant à volonté. «Cours après moi shérif» (Smokey and the bandit-77) est disponible chez CIC-3M. Pour « Tu fais pas le poids shérif» (Smokey and the Bandit ride again-80 chez CIC-3M), Needham dépensa une fortune afin de transformer la séquence finale en la plus colossale déglingue automobile jamais montrée sur un écran. Des centaines de voitures de police et ce poids lourds y rejouent la bataille des Ardennes dans le désert américain et c’est à en avaler son permis de conduire. UGC vient de sortir récemment «Cannonball 2», encore un jeu de massacre sur les chapeaux de roues organisé par Hal Needham. Cette production poids lourds, dans la lignée de « La plus grande course autour du mondes (le Blake Edwards de 65 chez Wamer) en moins bien peigné aligne une belle brochette de stars : Reynolds, Sinatra, Dean Martin, Sammy Davis Jr, Jacky Chan, Shirley Mc Laine, etc. En ce qui concerne l’humour ce n’est pas du Harold Pinter (qui ne connaît rien aux bagnoles), mais on s’y dérouille les zygomatiques, et ça bouge bien. Dommage que le scénariste, trop occupé à appuyer sur le champignon, ait oublié de se presser le citron pour réussir son final. Aux USA, où la vitesse est sévèrement réglementée, les road-movies sont devenus un genre cinématographique à part entière, plus souvent embouti qu’abouti. Sans vouloir jouer les fouille-méninges, l’aspect défoulatoire de ces bluettes justifie leur popularité pour une bonne part. Comme toujours en pareil cas, les humoristes et les satiristes se sont mis de la partie. Voici venu le moment de parler de « La course à la mort de l’an 2000», de Paul Bartel (réalisateur du premier «Cannonball», chez MPM). Ce film, judicieusement primé en 76 au Festival de Paris du film fantastique et de SF, vient de sortir chez Canal Vidéo sous le titre «Les seigneurs de la route». Interprètes, David Carradine et Sylvester Stallone. A notre avis, vous ne devez pas rater cette saugrenue merveille, quand bien même une majorité de critiquesbien pensantl’aiemassacrée. Dans cette anticipation rapprochée, cinq champions automobiles s’affrontent, au volant de leurs incroyables bolides, dans une course baptisée la Transcontinentale. Tuer le plus de gens possible (femmes, enfants, vieillards) au long du parcours, est l’objet même de la compétition, qui a pour effet secondaire de «soupaper» l’agressivité du bon peuple. Ecolo, anarcho sado et rigolo ce «Rollerball» goguenard et ronflant, sublimement mouvementé, est un petit chef-d’œuvre d’humour sang et noir, qui piétine allègrement les plates-bandes d’Hal Needham et consorts. La morale et surtout les humoristes ont eu le dernier mot. La boucle est bouclée. Mais si vous estimez que le compteur de votre magnéto peut encore grignoter du kilomètre, continuez la balade avec, pour s’en tenir aux éditions assez récentes : «A fond la caisse shérif», de Charles B. Griffith (coscénariste des «Seigneurs de la route»). Cette production Roger Corman est disponible chez UGC. «Autoroute pour la mort» (chez Vestron Vidéo) n’est pas une comédie, mais un thriller, excellemment carrossé par l’inévitable Hal Needham. Et également : «Six pack» (Les petites canailles) de Daniel Petrie chez CBS-Fox. «Course contre l’enfer» de Jack Starett (CBS-Fox) avec Peter Fonda. L’argument fantastique est vaseux, mais les cascades époustouflantes. D’elle, on ne sait pas grand chose. Ou peu, si pieu, et c’est peut-être tant mieux. Oh, bien sûr, elle s’amuse parfois à poser avec son bébé ou son mari et cela suffit à «rassurer» tous ceux qui ne la croyaient pas douée pour le bonheur en quadrichromie. Mais Nastassja, c’est sans doute plus, bien plus que ça. Osons même croire qu’il y a en elle autant de la funambule du «Coup de codeur» que de la fille de la haute ville de «La lune dans le caniveau» ; que de la panthère de «La féline» ou des déchirures faites femmes qui s’appelleraient Maria et qui vivraient à Paris, Texas. Ces rendez-vous, placés sous les meilleurs auspices, sont signés Polanski, Shrader, Coppola, Beineix, Wenders et Konchalovski pour le haut du gratin. Plus quelques autres dont James Toback ou Howard Zieff, maîtres d’œuvres quelque peu incomplètes. Nastassja, donc, reine des médias à qui elle se livre sans se donner, figure imposée d’un puzzle dont elle seule connaît la clé. D’une interview à l’autre, elle peut parfois dire tout, tout, tout… et son contraire sans que la vérité, la sienne, ne s’en trouve altérée. Des différents propos qu’elle tient au fil des ans se dégage toujours le supplément d’âme qui fait toute la différence avec ce qu’on, peut lire habituellement. Nastassja «heart and soul», pour reprendre le titre d’une récente chanson US. Le cœur et l’âme. Qui dit mieux ?

Une pensée sur “Ça passe ou ça casse

  • 17 août 2017 à 15 h 18 min
    Permalink

    Vous ne proposez plus de sélections ciné maintenant ? Dommage 🙁

    Répondre

Répondre à David Annuler la réponse

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *